Ethnies et église catholique au Rwanda

Chers amis d'A.M.I.,

Le 04 avril 1972, 11 prélats catholiques rwandais, non membres de l'Union Fraternelle du Clergé Rwandais (UFCR) se sont réunis à Rwesero. Il y avait alors 153 prêtres catholiques rwandais dont 120 membres de l'UFCR, soit 90 Tutsi (75%) et 30 Hutu.
33 prêtres non membres de l'UFCR, tous Hutu (100%), dont les 11 prélats signataires de cette lettre.
Ils ont écrit une lettre ouverte à leurs supérieurs, Mgr Perraudin en tête, lettre dont il appert quelques statistiques :
1/ 60% des étudiants étaient Tutsi à l'Université Nationale du Rwanda (UNR).
2/ 59% des prêtres étaient Tutsi.
3/ au moins 83% de religieux et religieuses étaient Tutsi.
Il faut tout de même mettre un bémol à ces chiffres. Par exemple, le 07 février 1974, chez les 335 sœurs Benebikira, il y avait 186 Bahutukazi et 149 Batutsikazi. Parmi les 205 sœurs diplômées, il y avait 109 Bahutukazi et 96 Batutsikazi.
Que répondent les agents du FPR : les gouvernements Hutu étaient anti-Tutsi et avaient instauré des quotas. On voit que c'est faux. Par contre, l'ex Président FPR Pasteur Bizimungu, depuis lors pasteurisé par le FPR, a fait partie à l'UNR des Comités de Salut Public pour réduire le pourcentage de Tutsi à l'UNR !

Les signataires du document du 04 avril 1972 écrivent que, depuis le synode avorté de Nyakabanda et depuis la mort de S.M. Rudahigwa Mutara III, une campagne de diffamation a été orchestrée par les Tutsi contre Mgr Perraudin, l'impliquant dans la mort du Mwaami. Dans cette lettre du 04 avril 1972, ces prêtres font part d'une lettre envoyée au clergé rwandais depuis l'étranger, suite à la défaite des Inyeenzi : « Que les prêtres Hutu soient chez eux et reçoivent toutes les faveurs du Gouvernement de leur race. Nous Tutsi, nous dominerons dans l'Eglise du Rwanda dont nous tenons les rênes et nous ne les lâcherons pas ». On devine là l'embryon du projet kagamiste, initié par le marxiste-léniniste Tito Rutaremara, de fondation d'une « Eglise Patriotique Rwandaise », le mot patriotique s'entendant bien entendu par « Dominée par les Tutsi ». De fait, les membres les plus zélés de l'UFCR profitèrent de congés en Europe pour demander au Pape de limoger Mgr. Perraudin, ce qui ne fut pas fait à juste titre, le Pape étant prudent. Ces prêtres agitateurs appartenaient donc à l'UFCR et étaient Tutsi.

On lit aussi une remarque faite par un missionnaire étranger au cours du synode de 1945 : « Plus d'une fois, j'ai entendu des Européens nous reprocher à nous les Pères des paroisses, de favoriser les Batutsi au détriment des Bahutu, d'aider les Batutsi à continuer leur séculaire oppression des Bahutu (« Abatutsi balya imitsi y'Abahutu » comme disent les Bahutu). Alors que ce serait leur devoir d'aider d'abord les plus faibles et les plus opprimés (les Bahutu). A l'appui de ces dires, les Européens donnent comme preuve le fort pourcentage d'élèves Tutsi envoyés dans les écoles d'Astrida, Kabgayi et Zaza alors que la classe la plus travailleuse, la plus nombreuse, la plus saine, et la plus intéressante n'avait que peu d'élèves dans les écoles. Ne serait-ce pas juste ? Le Gouvernement a une grosse part de responsabilité en cela car c'est lui surtout qui s'est servi des Batutsi. Mais beaucoup d'Européens du Gouvernement et de hauts placés comencent à dire qu'ils ont fait fausse route, que les Batutsi ne travaillent que pour eux-mêmes et que civiliser, c'est élever toutes les classes. Les Anglais, eux, se sont aperçus plus vite du petit jeu égoïste des Batutsi : aussi ont-ils chassé tous les Batutsi [et les Banyankore] de toutes les places du Gouvernement. Et il est amusant d'entendre les prêtres du Ruwenzori nous plaindre d'avoir tant de Batutsi chez nous et à tous les postes de commande ». Et plus loin : « Quand on en vient à dire comme un Père haut placé ''qu'il vaudrait prendre comme Balimu (catéchistes) les Batutsi car c'est un métier qui leur convient le mieux puisqu'ils ne veulent pas cultiver la terre'', n'est-ce pas favoriser la paresse au détriment des autres ? Ne devrait-on pas se demander d'abord quels qont ceux qui seraient les plus fidèles, les plus attachés à leur travail ? Or ce Père sait-il que les Batutsi commencent à négliger le travail de Mwalimu parce que c'est un travail de mission et non pas de Serkali (Gouvernement) . Certains sont maintenant honteux d'être commandés par des Pères, c'est plus relevé d'être au Gouvernement ».

Ces abbés « dissidents » demandaient plus de démocratie dans l'Eglise catholique, à commencer par une représentation des prêtres Bahutu proportionnellement au pourcentage réel de Bahutu dans la société.

Les signataires officiels de cette lettre de contestation étaient :
1/ Abbé Canisius Ndekezi (professeur au Petit Séminaire de Kabgayi) : assassiné par le FPR.
2/ Abbé Jean-MarieVianney Rusingizandekwe  (ex-Pere spirituel de Gregoire Kayibanda et directeur du Cycle Inférieur au Petit Séminaire de Kabgayi) : assassiné par le FPR.
3/ Abbé Gamaliel Mbonimana
4/ Abbé Apollinaire Rwagema (S.L.E.K., Kigali)
5/ Abbé Pierre Ntakarakorwa (Byumba)
6/ Abbé Alphonse Hategekimana (Musha)
7/ Abbé Michel Rwabigwi (Visiteur diocésain à Kabgayi)
8/ Abbé Claver Nyiringondo (Sainte Famille, Kigali)
9/ Abbé Jean-Baptiste Rugengamanzi
10/ Mgr Michel Natamakero (ex directeur du Petit Séminaire de Rwesero).
En réalité, il semble que la lettre ait été rédigée par un Père Blanc à la demande de l'Abbé Rwagema.

Bonne lecture et bon Dimanche.

Agaculama.