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 Editions Sources du Nil  : Livres sur le Rwanda, Burundi, RDCongo

Rwanda : Les procès GACACA ou l’art de calomnier et déshumaniser les intellectuels Hutu innocents

15 Septembre 2009 , Rédigé par Editions Sources du Nil Publié dans #Justice et Droits de l'homme

CENTRE DE LUTTE CONTRE L’IMPUNITE

ET L’INJUSTICE AU RWANDA  (CLIIR*)

Boulevard Léopold II, n°227                                                 Bruxelles, le  10 septembre 2009

1080 BRUXELLES

Tél/Fax : 0032.81.60.11.13

GSM:  0032.476.70.15.69

Mail : cliir2004@yahoo.fr

 

COMMUNIQUE  n° 118/2009

 

Rwanda : Les procès GACACA ou l’art de calomnier et déshumaniser les intellectuels Hutu innocents.

Le cas de M. Stanislas Mbanenande condamné arbitrairement à perpétuité.

 

« Savoir travestir la vérité, manier le génie de l’intrigue, maîtriser l’art de mentir et de calomnier et bafouer la loi sur les tribunaux Gacaca par des procès fantaisistes. Ce sont toutes ces stratégies utilisées dans les procès GACACA pour condamner des intellectuels Hutu et voler leurs biens mobiliers et immobiliers » : Voila les commentaires fournis par des témoins oculaires présents au procès GACACA de M. Stanislas MBANENANDE.

Le procès de Stanislas Mbanenande est un cas type de ce que la Note Verbale n° 2155/06/RS du Secrétariat d’Etat du Vatican adressée à l’Ambassade d’Allemagne au Vatican épingle comme suit : «Les accusés sont en majorité des Hutu ayant fait des études secondaires ou qui ont des biens…Ce sont les autorités politiques qui décident à l’avance qui doit être jugé et quelle est la sentence à appliquer …Tout le déroulement de la séance semble organisé d’avance» (Cité par Fondation Hirondelle, 12/05/2006).  C’est ce qui s’est passé dans le procès tenu contre Monsieur Stanislas MBANENANDE, un ingénieur civil Hutu qui n’est jamais apparu sur les habituelles listes noires du gouvernement rwandais depuis 15 ans.

 

Calomnié et diabolisé en quelques jours par un syndicat de délateurs commandé par l’ancien bourgmestre de Gitesi, Monsieur Vianney NKURUNZIZA, cet ingénieur civil Hutu a été condamné arbitrairement à la prison à vie avec isolement par le tribunal GACACA du secteur de BWISYURA, district de KARONGI dans la province de l’Est (ancienne commune de Gitesi, préfecture Kibuye). Après un procès fantaisiste qui n’a duré que 30 minutes, ce tribunal Gacaca a rendu son jugement en l’absence de l’accusé en date du 13 août 2009. N’ayant jamais appris qu’il avait été convoqué à se présenter devant ce tribunal le 6 août 2009, son procès a été reporté au 13 août 2009, jour de sa condamnation arbitraire.

En effet, Ce n’est que le 17/08/2009 que M. Stanislas Mbanenande a appris la nouvelle de sa condamnation par voie de presse au cours d’une interview de M. Augustin NKUSI, porte parole du procureur, diffusée à la radio BBC émettant en Kinyarwanda à partir de Londres.

 

Comme c’est devenu la mode ces derniers temps lorsqu’il s’agit de diaboliser et terroriser les intellectuels Hutu résidant en Europe où ailleurs dans le monde, cette condamnation à perpétuité a été relayée et publiée par le quotidien progouvernemental The New Times sous la plume de M. Sam NKURUNZIZA. D’après ce journal, M. Stanislas Mbanenande a été condamné, parce il aurait été reconnu coupable de quatre (4) chefs d’accusation après ce procès qui n’a duré que 30 minutes, c’est-à-dire: (1) d’avoir participé au génocide, (2) d’avoir tués personnellement  des personnes,  (3) d’avoir dirigé des massacres à l’encontre des tutsi et (4) d’avoir été en possession illégale d’armes de guerre.

Comme c’est devenu une habitude dans les procès Gacaca, les témoins à décharge ne peuvent plus s’exprimer par peur des représailles allant jusqu’à des condamnations de plusieurs mois ou années de prison. Quant aux témoins à charge, ils sont dispensés de fournir des preuves ou des précisions concernant leurs accusations. C’est exactement le même scénario qui s’est déroulé dans le procès du 13 août 2009 contre Stanislas Mbanenande. Lors de ce procès, les juges Gacaca ne se sont pas donnés la peine de contre interroger les accusateurs qui ont été incapables de préciser l’identité, le nombre des victimes, les dates et les lieux où se seraient déroulés les crimes imputés à l’accusé. En outre le commanditaire du procès, NKURUNZIZA JMV, n’a pas comparu. Il a préféré envoyer le groupe de délateurs qu’il avait recruté.

 

Après son enquête fouillée sur le comportement de l’intéressé, le Centre de Lutte contre l’Impunité et l’injustice au Rwanda (CLIIR)* dénonce cette condamnation arbitraire qui frappe de nouveau un intellectuel Hutu non pas pour des crimes qu’il aurait commis mais parce qu’il est né Hutu.

 

Notre enquête auprès des ressortissants de Gitesi (Kibuye) a démontré que M. Mbanenande Stanislas a été condamné en sa qualité d’intellectuel et de propriétaire immobilier Hutu pour lui spolier ses deux maisons et lui faire perdre son travail actuel au sein d’un organisme suédois qui l’emploie au Tchad.

 

Chronologie des faits révélés par notre enquête :

-         C’est en juillet 2009 que le commanditaire du faux procès contre M. Stanislas Mbanenande, à savoir Jean Marie Vianney NKURUNZIZA, lance sa première campagne de délation et de diabolisation en déclarant devant le Gacaca qu’il aurait collecté des informations au sujet des crimes commis par Stanislas. Avant 1994, JMV Nkurunziza était un ancien enseignant de l’école primaire et un chrétien engagé. Il a été conseiller paroissial et membre de la Chorale. Il était correct avant 1994. Après le génocide de 1994, il est resté à Kibuye et n’avait rien à reprocher à M. Stanislas Mbanenande jusqu’en juillet 2009. La mère de Stanislas, Mme NIKUZE Assinath, n’a jamais enregistré une quelconque accusation contre son fils jusqu’à son décès le 16/06/2008 à Kibuye. Après la condamnation de M. Stanislas, sa mère, qui tenait le patrimoine familial à Kibuye, est à son tour diabolisée et accusée d’avoir pillé les tutsi.

-         En trois semaines, NKURUNZIZA exerça de fortes pressions sur un ancien détenu Hutu, M. Hassan RUKERA, pour qu’il soit l’accusateur principal dans ce procès monté de toutes pièces. Monsieur RUKERA a été libéré grâce au système de ses « aveux marchandés » pour sa culpabilité dans le génocide. M. Nkurunziza a ensuite recruté un motard, connu sous le nom d’ALPHONSE dans la ville de KIBUYE. Ce dernier est venu appuyer l’accusateur principal Hassan Rukera. M. Nkurunziza a ensuite terrorisé un certain SAMSON, fils de Rusesabagina alias « Rusesa » pour qu’il aille calomnier Stanislas Mbanenande devant le tribunal Gacaca de Bwishyura.

-         Le tribunal GACACA était présidé par un autre Tutsi, Monsieur RUZINDANA Alphonse, qui serait un ancien berger de bétail manipulé par JMV Nkurunziza.

-         Le commanditaire de ce faux procès, JMV NKURUNZIZA fut bourgmestre de la commune Gitesi (dans laquelle se trouve la ville de Kibuye) de 1994 à 2003. Par ses fonctions, il a aidé l’ancien préfet de la préfecture Kibuye, M. Assiel KABERA, dans les crimes d’épuration ethnique commis contre des Hutu innocents dans cette préfecture. Depuis les neuf (9) ans où il fut bourgmestre de la commune Gitesi, M. Nkurunziza n’avait jamais accusé ou soupçonné un membre de la famille de Stanislas MBANENANDE. Ce n’est qu’en juillet 2009 que les fausses accusations ont été montées contre cet intellectuel qui possède deux maisons dans la ville de Kibuye.

-         JMV NKURUNZIZA travaille actuellement avec une équipe d’agents de la DMI[1] (Directorate of Military Intelligence) infiltrée dans le Service National des Juridictions Gacaca (SNJG) pour mieux superviser l’élimination systématique des Hutu par les faux procès GACACA. Cette équipe supervise tous les tribunaux GACACA dans tout le pays et veille à orchestrer des condamnations très lourdes contre des intellectuels, des religieux, des fonctionnaires, des commerçants, des leaders d’opinion et de la société civile, des artisans, etc… parce qu’ils sont nés Hutu et non pour les crimes qu’ils auraient commis. Pour cette équipe, l’arme judiciaire GACACA est devenue un instrument génocidaire contre les Hutu vivant au Rwanda ou résidant en exil.

 

Monsieur JMV NKURUNZIZA serait impliqué également dans d’autres complots et faux procès contre de nombreux Hutu innocents dont certains avaient été acquittés par les tribunaux ordinaires ou par les tribunaux GACACA dans lesquels siégeaient encore quelques juges intègres avant qu’ils soient disqualifiés et emprisonnés à leur tour par la DMI qui contrôle et paralyse les GACACA. Voici la liste non exhaustive des autres Hutu victimes des tribunaux GACACA à Kibuye :

-         MUGAMBIRA Aphrodis, un commerçant important de Kibuye qui a déjà passé plusieurs années en prison. Il avait été libéré récemment par un tribunal Gacaca. Grâce aux stratégies de liquider tous les Hutu riches et propriétaires de biens, il a été de nouveau condamné.

-         NDINDABO Jean Damascène est un autre intellectuel Hutu emprisonné pendant plus de 10 ans avant d’être acquitté car son dossier était vide. Il a été arrêté de nouveau car sa belle maison est convoitée à Kibuye. M. Ndindabo fut un ancien comptable à la préfecture de Butare avant 1994. Il a été comptable au CASA, une Cellule d’Appui aux Services Agricoles financée par la coopération suisse. Il fut proposé comme député du PSD (Parti Social Démocrate) pendant le multipartisme avant le génocide. Dans les camps de réfugiés en RDC, il a travaillé à Radio Agatashya avant d’être rapatrié de force lors des massacres de réfugiés Hutu dans l’ex-Zaïre à partir de 1996.

-         RUTAKAMIZE Emmanuel est un ancien chauffeur à la coopération Suisse. Il avait été emprisonné après 1994 puis libéré. Récemment, il a de nouveau été remis en prison.

-         GASIHIRI Léandre est un handicapé physique. Il est mécanicien moto et le seul fabricant des clés à Kibuye. Détenu pendant plus de 10 ans, il avait été libéré. Il est de nouveau remis en prison parce qu’il serait accusé d’avoir pillé les tutsi. Sa femme qui est tutsi a tenté de le défendre en vain. Aucun Hutu ne doit survivre aux Gacaca.

-         SENGORORE Védaste est un ancien chauffeur du MINITRAPE qui a déjà passé plusieurs années en prison avant d’être acquitté car son dossier était vide. Grâce aux tribunaux GACACA, il a été de nouveau emprisonné récemment.

-         Monsieur DONAT est un ancien détenu aussi. Lorsqu’il a appris qu’un groupe de délateurs a été organisé pour le faire jeter en prison, il a été contraint de fuir.

-         NEMEYABAHIZI François est un ancien directeur de l’Ecole Technique Officielle (ETO) de Kibuye. Il avait déjà été emprisonné arbitrairement depuis plus de 10 ans. Il est menacé aujourd’hui par les tribunaux Gacaca ;

-         MUSAFIRI Jérôme fut un ancien bourgmestre de la commune Gitesi, puis sous préfet à Kibuye. Pendant les élections du président Paul KAGAME en 2003, il a été recruté pour mener avec succès sa campagne électorale. Il y a quelques semaines, il a été visé par les tribunaux GACACA et risque la prison comme d’autres Hutu innocents.

 

M. Stanislas Mbanenande est un ingénieur civil connu pour son intégrité.

Il est né le 26 août 1958 à Mbogo, dans l’ancienne commune de GITESI dans la préfecture KIBUYE. Son père RUZIGIMPURUZA André (assassiné à Kibuye le 6 juin 1994  et sa mère NIKUZE Assinath (décédée le 16 juin 2008 à Kibuye) n’ont eu que deux enfants. En tant que fils aîné de ses parents, M. Stanislas MBANENANDE est le seul survivant de sa famille car sa sœur unique, Colette MUGULIMALI, a disparu en juin 1994 dans la région de Gitarama jusqu’à ce jour. Il s’est marié à Nyarugenge, Kigali, le 15 Août 1987 à MBANENANDE Mukazana Jeanne d’Arc, fille de RWAMBONERA Ephrem et de NIBAKUZE Léocadie (tous décédés), avec laquelle il a trois (3) enfants, deux filles et un garçon. Lui et sa famille ont tous acquis la nationalité suédoise et sont tous domiciliés en Suède.

Voici un bref aperçu de son vécu et quelques unes de ses anciennes fonctions :

 

Etudes faites :

-         De 1964 à 1970 : Etudes primaires à Nyanza et à Kibuye ;

-         De 1970 à 1975 : Etudes secondaires aux Collèges de Birambo et Byimana

-         De 1975 à 1978 : Etudes supérieures à l’Ecole Technique Officielle de Kicukiro (Diplôme A2 en Travaux Publics).

-         De 1980 à 1986 : Etudes à l’Institut Polytechnique de Krasnadar en RUSSIE (Diplôme de Maîtrise en Génie Civil : Construction des Bâtiments) ;

-         De février 1990 à janvier 1993 : Etudes à l’Université de Sherbrooke, CANADA (Diplôme de Maîtrise en Génie Civil : Géotechnique : Mécanique des rocs et des sols).

-         De juin 1993 à décembre 1995 : Voyage d’Etude à l’Université de Gand en Belgique. En février 1994, il retourne collecter des données pour sa recherche au Rwanda où il est resté bloqué par la guerre et les massacres de 1994.

 

Différentes fonctions exercées depuis plus de 30 ans:

-         De juin 1978 à janvier 1979 : Chef de chantier sur différents sites de l’entreprise de constructions EMUJECO au Rwanda ;

-         De février 1979 à septembre 1980 : Conducteur des travaux de constructions scolaires, Ministère de l’Education Nationale à Kigali au Rwanda ;

-         De septembre 1986 à janvier 1990 : Professeur dans différentes Ecoles Techniques Officielles (Kanombe et Kicukiro) pour le compte du Ministère de l’Education Nationale à Kigali au Rwanda ;

-         De juin 1990 à décembre 1992 : Chargé d’Exercices, Université de Sherbrooke au Canada dans le Département de Génie civil, Faculté des Sciences Appliquées ;

-         De février 1993 à 1994 : Professeur Assistant à l’Université Nationale du Rwanda (UNR), Faculté des Sciences Appliquées ;

-         De juillet 1994 à août 1996 pendant son exil au Kivu en RDC: Coordinateur des Projets de Développement (auprès de CARITAS International et du MISEREOR Allemand), Bureau Diocésain de Développement, diocèse de BUKAVU en RDC ;

-         De février 1997 à Mars 2000 : Ingénieur Civil auprès de l’Organisation Internationale de l’Aviation Civile à Naïrobi au Kenya ;

-         De mars 2000 à avril 2006 : Ingénieur civil et Logisticien dans différentes missions de l’Organisation des Nations Unies (ONU) de maintien de la paix (en Ex-Yougoslavie et en Côte d’Ivoire) ;

-         Depuis Septembre 2008 : Ingénieur civil et Chef d’équipe technique dans l’Agence du gouvernement suédois (MSB), auprès du Haut Commissariat aux Réfugiés (HCR) au TCHAD pour une assistance technique en construction des bâtiments ;

 

Autres expériences pertinentes :

-         1987 - 1990 : Consultant auprès des différentes institutions : Coopération technique Suisse, Kigali Rwanda, Briqueterie Rwandaise de RULIBA, Kigali, Rwanda ; USAID et la Banque Mondiale ;

-         1987 – 1990 : Professeur visiteur auprès de l’Université Nationale du Rwanda (UNR), Faculté des Sciences Appliquées, Butare, Rwanda ;

-         1993 – 1994 : Professeur visiteur auprès de l’Université Adventiste de Mudende, Faculté des Sciences Appliquées, Gisenyi, Rwanda.

 

Bref résumé de son vécu avant et pendant les massacres de 1994 :

-         21 février 1994 : Retour au Rwanda en provenance de la Belgique (Gand) ;

-         06 avril 1994 : Stanislas quitte Butare dans l’après-midi pour aller donner les cours à l’Université de Mudende le lendemain. Il passe voir sa femme à Kigali où elle travaillait comme agent à l’entreprise de Café RWANDEX.

-         Du 6 avril au 13 avril : Stanislas et sa famille reste bloqué à Kigali après l’assassinat du chef de l’Etat et le début des massacres.

-         Le 13 avril 1994 : Stanislas a quitté Kigali pour Gitarama ;

-         Le 20 avril 1994 : Il quitte Gitarama et rentre chez ses parents à Kibuye ;

-         Du 8 mai au 16 mai 1994 : retourne à Gitarama à la recherche de sa petite sœur Colette MUGULIMALI qui a disparu jusqu’à ce jour. Elle a laissé des orphelins.

-         Les 19 et 20 mai 1994 : Il va chercher à Gitarama la dépouille mortelle de son beau frère Jacques RWAMBONERA tué à Giticyinyoni le 19 mai 1994 vers 10heures.

-         Le 22 mai 1994 : Enterrement de son frère Jacques Rwambonera à Kibuye ;

-         Le 6 juin 1994 : son père André RUZIGIMPURUZA, planton à la préfecture Kibuye, est assassiné par un ou des malfaiteurs non identifiés à Kibuye. Il fut retrouvé apparemment étranglé par un ou des inconnus dans les toilettes d’un café à Kibuye.

-         Fin juin 1994 : Départ de la famille Mbanenande Stanislas vers BUKAVU (ex-Zaïre et actuel RDC) en passant par la frontière de Cyangugu au sud-ouest du Rwanda ;

-         Avant de fuir KIBUYE et après la mort tragique de son père, M. Stanislas MBANENANDE a pris soin de sauver et remettre aux soldats français de la mission Turquoise sa belle-mère Tutsi (la seconde femme illégitime de son père) qui avait été cachée chez la maman de Stanislas entre avril et juin 1994. Cette femme a survécu et serait décédée de maladie à Kigali après le génocide.

-         Le seul contact que l’on pourrait qualifier de politique, c’est d’avoir côtoyé de très près SENDASHONGA Seth à Nairobi jusqu'à son assassinat le 16/05/98, et discuté avec lui au sujet des problèmes liés à la situation des droits de l’homme au Rwanda.

 

CONCLUSION : Les Gacaca fonctionnent comme les tribunaux russes sous Staline.

 

Les chefs militaires et politiques du FPR ont créé et utilise le système GACACA comme des tribunaux militaires « staliniens » sous la dictature de Staline en Russie. Cette arme judiciaire, qualifiée à tort comme une justice rendue par la population est infaillible. Cette arme a été capable de condamner à tort et à travers et de juger, d’une manière industrielle, plus de 1.500.000 de Hutus depuis la création des juridictions GACACA (selon la déclaration du Ministre de la justice rwandaise, M. Tharcisse KARUGARAMA). Que ce soit les tribunaux ordinaires ou GACACA, ils pratiquent tous une justice ethnique qui discrimine les criminels pour condamner les seuls suspects Hutu, tout en épargnant les criminels Tutsi dont les crimes sont actuellement jugés par la justice espagnole qui a délivré 40 mandats d’arrêt internationaux contre 40 officiers des Forces Rwandaises de Défense (FRD) le 6 février 2008.

 

D’après le communiqué du CLIIR n°80/2005 du 18/03/2005, c’est à partir de 2002 que les chefs militaires et politiques du FPR ont décidé de détourner les juridictions GACACA de leur mission principale à savoir : rétablir la vérité, permettre à la population de témoigner et réconcilier le peuple rwandais. Pour réussir ce détournement criminel, les agents de la DMI (Directorate of Military Intelligence) ont été infiltrés parmi les candidats qui devaient être élus par la population pour jouer le rôle des « juges Gacaca. A partir de mars 2005, les agents de la DMI, qui avaient infiltré les

 Gacaca, ont exercé des pressions et des menaces sur les quelques  juges intègres « rescapés » de la 1ère épuration ethnique des Gacaca. Dans son interview à la BBC du 15 juillet 2006, Madame Domitila MUKANTAGANZWA, Secrétaire Exécutif du Service National des Juridictions Gacaca (SNJG), a reconnu que son Service a remplacé plus de 45.000 juges élus initialement par la population (soit environ 25% des 200.000 juges). Ces juges, élus comme des personnes intègres par la population ont été ajoutés sur les listes des présumés génocidaires Hutu par les agents de la DMI infiltrés au sein du Service National des Juridictions Gacaca (SNJG). C’est pour avoir résisté aux pressions ou parce qu’ils n’avaient pas la confiance de la DMI que ces juges intègres élus par la population ont été « disqualifiés et exclus » de ces juridictions par après.  

 

Les professeurs d’université et de collège, les commerçants, les anciens cadres politiques et administratifs, les fonctionnaires et les militaires, les paysans et les grands propriétaires terriens, les artisans et des étudiants ont été emprisonnés et condamnés sans enquête et sans dossiers judiciaires, non pas pour des crimes qu’ils auraient commis mais parce qu’ils sont nés Hutu. Sans aucune volonté de les juger équitablement, des milliers de détenus Hutu sont morts en détention sans jugement.

 

M. Stanislas MBANENANDE vient s’ajouter sur la longue liste d’autres anciens professeurs, des médecins et des cadres Hutu (ayant résidé dans la cité universitaire de Butare) et qui ont croupi en prison sans dossiers avant d’être condamnés arbitrairement à perpétuité ou à 30 ans pour certains en 2007. Il s’agit notamment de plusieurs professeurs de l’UNR :

-         Professeur RUNYINYA Barabwiriza (Voir communiqué CLIIR n°112/2008) et Dr KAGERUKA Martin (ils croupissent en prison depuis 15 ans sans procès)

-         Professeur Bernard Mutwewingabo et le Dr GATERA Godefroid (mort en prison) .

-         Damien IYAKAREMYE (a été acquitté après 7 ans et puis il a été remis en prison),

-          Bernard UZABAKILIHO et son épouse Antoinette NYIRABAKUNGU (décédée),

-          Athanase HAKIZIMANA et son épouse Concensa NYIRABIGIRIMANA etc…

Le 5 septembre 2007, le tribunal GACACA de Huye à Butare a condamné à 30 ans de prison plusieurs médecins ayant étudié, vécu ou travaillé à Butare. Voici leur liste : Dr BARARENGANA Séraphin (chirurgien), Dr BIGIRIMANA Ignace (Cardiologue), Dr MUNYEMANA Sosthène (Gynécologue), Dr SIJYENIBO Charles (Stomatologue), Dr NSHIMYUMUKIZA Joth (ophtalmologue), Dr NSENGIYUMVA Jean Népomuscène (généraliste interniste), Dr HABARUGIRA Pascal (gynécologue), Dr Pierre MUGABO (cardiologue et pharmacologue). D’autres médecins comme les Docteurs Bruno NGIRABATWARE, Aloys BIGIRANKANA ont été condamnés arbitrairement car certains vivaient en exil ou ont dû vite s’exiler. En 2009, les 30 ans ont été transformés en prison à perpétuité toujours sans preuves et sans aucune enquête.

Depuis la victoire militaire de la rébellion tutsie dénommée « Front Patriotique Rwandais » FPR, des milliers de civils Hutu ont été massacrés systématiquement et leurs cadavres ont été incinérés au gasoil sur de nombreux sites crématoires éparpillés au Rwanda. Ceux qui ont survécu, et qui n’ont pas eu la possibilité de s’exiler, ont été stockés dans les prisons mouroirs du Rwanda depuis 15 ans. Voir, en annexe, des extraits du livre du Lt Abdul RUZIBIZA sur les massacres de civils Hutu et l’incinération de leurs cadavres par le FPR.

Si M. Stanislas MBANENANDE était retourné au Rwanda, il serait mort ou en prison. Examinons le témoignage du Lieutenant Abdul Joshua RUZIBIZA qui confirme le sort réservé aux Hutu qui n’ont pas pu fuir le Rwanda où qui ont eu le malheur d’y retourner. Son livre de 494 pages a été publié à Paris en octobre 2005 aux Editions Panama et est intitulé « Rwanda : Histoire secrète ». Dans les pages 262 et 263, il décrit la chasse menée par le 3ème bataillon du FPR contre les intellectuels Hutu dans la ville de Kigali  comme suit:

« 13/04/1994. Depuis cette date, les unités se sont partagées les tâches à Kigali.

Le 3è bataillon, le plus expérimenté dans la ville, a reçu la mission de protéger les dirigeants politiques du FPR, d’approvisionner en munitions le 59è mobile, le 101’ et Alpha mobile. L’autre tâche importante était celle de délivrer les dirigeants politiques encore vivants dans le camp adverse et que le FPR escomptait utiliser après la prise du pouvoir. Hormis certaines personnes qui devaient être délivrées, aucun plan de secours pour les tutsis n’a été mis en place. Le 3ème bataillon était au courant du massacre des Tutsis à l’ETO (Ecole Technique Officielle de Kicukiro) qui n’était pas loin mais il n’est jamais intervenu. Des massacres identiques se sont déroulés au Centre Christus de Remera, rien n’a été entrepris pour les arrêter. Pire encore, à Kimihurura, il n’y eut aucune intervention pour sauver les Tutsis massacrés au centre des Frères césariens (salésiens), tout près des positions des militaires du 3è bataillon de l’APR.

 

L’autre tâche, accomplie par le 3è bataillon, la DMI (Directorate of Military Intelligence)  et les extrémistes du FPR, a été la sélection et l’enlèvement de Hutus partout où ils étaient faits prisonniers par l’APR dans la ville de Kigali. Ils étaient raflés pour être liquidés par la suite. Cette tâche a été accomplie par des gens qui connaissaient bien la ville de Kigali et par les politiciens protégés par le FPR. C’est le capitaine Charles KARAMBA, le capitaine Jean Damascène SEKAMANA, le sergent Déus KAGIRANEZA et les autres agents de renseignement qui ont établi des listes de Hutus à tuer sous le prétexte qu’ils étaient des Hutus instruits ou avaient des familles influentes. La tâche était facile parce qu’ils prenaient des renseignements auprès des familles tutsies réfugiées au CND ou au stade Amahoro à Remera. Parmi ces civils, on peut citer GATETE Polycarpe, Paul MUVUNYI, Jean Marie MUNYANKINDI, Théoneste MUTSINDASHYAKA et particulièrement Tito RUTAREMARA, qui avait vécu à Kigali un certain temps, et encore d’autres. Les plus hauts dirigeants, comme Tito RUTAREMARA, qui ne connaissaient pas beaucoup de politiciens dans la ville de Kigali demandaient des renseignements à ceux qui connaissent la ville, comme Deus KAGIRANEZA, pour désigner ceux qui devaient être tués. Je citerai par exemple le cas d’Emmanuel BAHIGIKI qui avait été secrétaire général au ministère du Plan et dirigeait le Centre IWACU[2]. Le motif de son assassinat fut d’avoir déclaré être en possession d’une liste d’au moins cent personnes assassinées par l’APR (Armée Patriotique Rwandaise) dans la zone tampon pour avoir refusé de suivre l’idéologie du FPR (Front Patriotique Rwandais), ainsi que des dirigeants locaux élus par la population qui refusaient l’allégeance au FPR. Son assassinat a été commandité par le capitaine Charles KARAMBA ». Tous les militaires et civils tutsi cités par Ruzibiza n’ont jamais été inquiétés. Ils vivent tranquillement à Kigali et continuent d’opprimer des Hutu innocents ».

Recommandations :

- Nous recommandons la plus grande clairvoyance à INTERPOL, aux magistrats occidentaux, aux services chargés d’aider les réfugiés, aux services concernés par la politique de déportation ou d’expulsion des personnes qui ont trouvé refuge ou qui se sont installés dans plusieurs pays, afin que Monsieur Stanislas MBANENANDE ne soit pas victime d’une arrestation, d’une extradition ou d’une déportation vers le Rwanda où il risque de perdre sa vie ou sa liberté en tant que membre du groupe ethnique Hutu visé par un plan d’extermination bien réel (voir p.20 du Mémorandum adressé au Conseil de Sécurité de l'ONU par la Cellule de la documentation et de la sécurité du Partenariat Intwari en février 2008 : Sur base des documents ultrasecrets provenant des archives ougandaises, la seule planification prouvée du génocide rwandais consistait déjà en 1989 à « programmer l'assassinat du président Hutu, Juvénal Habyarimana (assassiné dans l’attentat terroriste du 6/04/1994), et l'extermination des populations Hutu qualifiées "d'ennemis régionaux").

- Nous demandons que tous les rwandais réfugiés partout dans le monde soient protégés et ne soient pas victimes des déportations, des extraditions judiciaires vers le Rwanda. Que les mandats d’arrêt émis par la justice rwandaise ne soient pas pris au sérieux, vu le caractère des condamnations arbitraires qui sont prononcées par des juges « soumis au pouvoir dictatorial militaire du FPR » à l’issue des procès inéquitables téléguidés par des syndicats de délateurs. Monsieur Stanislas MBANENANDE est une véritable victime d’un complot judiciaire.

- Il faut arrêter cet autre génocide qui s’achève au Rwanda sous couvert des tribunaux GACACA. Que tous les pays et organismes internationaux qui fournissent au Rwanda un soutien financier, militaire, diplomatique et politique cessent d’être complices de cette politique d’élimination d’une partie du peuple rwandais. Pour reprendre le témoignage d’un intellectuel rwandais (psychopédagogue et économiste), vivant au Canada, M. François Munyabagisha : « Il y a un génocide malin, couvert par les odeurs d’un autre génocide qui heureusement lui s’est arrêté avec la victoire (militaire) d’une machine à tuer sur une autre. Cette machine victorieuse est investie depuis en héros, ce qui lui a permis de poursuivre avec minutie et plein de munitions son macabre plan d’extermination de toute résistance à sa marche. Le FPR (Front Patriotique Rwandais) n’a pas arrêté le génocide, il a gagné les concours de tueries en 94, et depuis il a changé de logistique »[3].

Pour le Centre, MATATA Joseph, Coordinateur.

 

CLIIR* : Le Centre de Lutte contre l’Impunité et l’Injustice au Rwanda est une association de défense des droits humains basée en Belgique, créée le 18 août 1995. Ses membres sont des militants des droits humains de longue date. Certains ont été actifs au sein d’associations rwandaises de défense des droits humains et ont participé à l’enquête CLADHO/Kanyarwanda sur le génocide de 1994. Lorsqu’ils ont commencé à enquêter sur les crimes du régime rwandais actuel, ils ont subi des menaces et ont été contraints de s’exiler à l’étranger où ils poursuivent leur engagement en faveur des droits humains.

 

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[1] La DMI (Directorate of Military Intelligence) est une véritable « machine à tuer », une sorte de GESTAPO Tutsi créée et dirigée par le président rwandais et président du FPR (Front Patriotique Rwandais), le Général Paul KAGAME. La DMI a impunément assassiné et fait disparaître des milliers d’opposants politiques (réels ou supposés) et de citoyens rwandais Hutu et Tutsi depuis plus de 15 ans»

[2] Le Centre IWACU était une ONG d’appui aux groupements et entreprises associatives.

[3] Témoignage publié par Fr. Munyabagisha à la Tribune libre de Vigile (Canada) samedi 5 septembre 2009.

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