Un dossier intéressant de Human Rights Watch sur les crimes de l'état rwandais contre ses opposants
Depuis le génocide qui a dévasté le Rwanda et fait plus d'un demi-million de morts en 1994, ce pays a réalisé des progrès remarquables dans la reconstruction de son infrastructure, le développement de son économie et la fourniture de services publics. Toutefois, les droits civils et politiques restent strictement limités et la liberté d'expression fait l'objet de sévères restrictions. Le gouvernement dominé par le Front patriotique rwandais (FPR) — un ancien mouvement rebelle qui a mis fin au génocide — ne tolère pas l'opposition, la contestation ou la critique. Au cours des 19 années écoulées depuis que le FPR a pris le pouvoir, Human Rights Watch a documenté de nombreux cas d'arrestations arbitraires, de mises en détention, de poursuites judiciaires, de meurtres, d’actes de torture, de disparitions forcées, ainsi que de menaces et de manœuvres de harcèlement et d'intimidation contre des opposants du gouvernement et d’autres voix critiques. Ces abus ont commencé à être commis immédiatement après le génocide au milieu des années 1990 et se sont poursuivis jusqu'à ce jour.
Parallèlement à la répression des voix dissonantes à l'intérieur du Rwanda, des dissidents et des personnes considérées comme des détracteurs ayant trouvé refuge dans d’autres pays — en Ouganda ou au Kenya voisins, et jusqu'en Afrique du Sud et en Europe — ont été victimes d'attentats et de menaces.
Ce document met en lumière certains incidents lors desquels des détracteurs du gouvernement à l'extérieur du Rwanda ont été victimes d'attentats ou de menaces depuis la fin des années 1990. Cette liste n'est pas exhaustive. Human Rights Watch a documenté ces cas ou recueilli des informations crédibles indiquant que les victimes avaient été vraisemblablement visées en raison des critiques qu’elles avaient formulées à l’encontre du gouvernement rwandais, du FPR ou du président Paul Kagame. Il y a eu d'autres incidents lors desquels des Rwandais ont été assassinés, attaqués, menacés ou sont morts dans des circonstances non éclaircies dans divers pays, mais qui ne sont pas inclus dans ce document en raison d'un manque d'informations suffisantes à leur sujet.[1]
Contexte des attentats
Les victimes d'attentats à l'étranger étaient généralement des opposants politiques ou des personnes ayant émis des critiques directes à l'encontre du gouvernement rwandais ou du président Kagame. D'anciens responsables du FPR qui étaient entrés en désaccord avec le président Kagame et étaient devenus des opposants en exil ont été particulièrement visés par ces attentats et ces menaces. Des similitudes ont été relevées entre plusieurs attentats contre des opposants en vue, tels que les assassinats de l'ancien ministre de l'Intérieur Seth Sendashonga en 1998 et de l'ancien chef des renseignements extérieurs Patrick Karegeya en 2014, ainsi que la tentative d'assassinat de l'ancien chef d'état-major de l'armée Kayumba Nyamwasa en 2010, le premier perpétré au Kenya et les deux autres en Afrique du Sud.
Un certain nombre des victimes s'étaient vu accorder le statut de réfugié dans le pays dans lequel ils s'étaient enfuis, compte tenu des risques qu'ils couraient au Rwanda. Le fait que même des personnes officiellement reconnues comme réfugiés aient été victimes de tels attentats accentue le sentiment de peur parmi les Rwandais en exil, qui estiment maintenant que personne n'est à l'abri.
La persistance des attentats contre les détracteurs en exil du gouvernement rwandais, qui ont commencé il y a près de 20 ans, est frappante, le dernier en date —l'assassinat de Patrick Karegeya —ayant été commis en janvier 2014. En tant que détracteurs ou opposants du gouvernement, les victimes ont toutes en commun un certain profil; avant ces attentats, plusieurs d'entre elles avaient été menacées par des individus qui faisaient partie, ou étaient proches, du gouvernement rwandais. Le fait qu'au Rwanda même, de nombreux opposants du gouvernement ont également fait l'objet de menaces et d'attentats, et le contexte plus large de persécution des détracteurs du gouvernement, rend crédibles les allégations selon lesquelles ces attaques étaient inspirées par des motifs politiques. Ces attentats suscitent également des préoccupations graves et plausibles concernant la possibilité que les autorités de l'État en ont été complices, ou les ont tolérées.
Dans tout cas d’allégation ou de supposition de connivence de la part d'agents de l'État par rapport à un meurtre ou un attentat, le droit international relatif aux droits humains exige qu'une enquête publique, indépendante et effective soit rapidement ouverte afin d'examiner, de manière sérieuse et efficace, cette possibilité de collusion.
Cependant, dans presque tous les cas évoqués dans ce document, l'absence de progrès dans la tenue d'enquêtes effectives qui soient de nature à permettre d'identifier les responsables des attentats, notamment ceux qui les ont ordonnés, et de les traduire en justice, est une source de préoccupation. À l'exception du procès de six personnes accusées d’avoir été impliquées dans la tentative d'assassinat de Kayumba Nyamwasa en 2010 en Afrique du Sud, qui suivait son cours au moment de la rédaction de ces lignes, il y a eu très peu d'arrestations et encore moins de poursuites en justice. Trois hommes qui avaient été inculpés et jugés pour l'assassinat au Kenya en 1998 de l'une des victimes les plus en vue, Seth Sendashonga, ont été acquittés. Personne n'a été condamné dans cette affaire.
La réponse du gouvernement rwandais
Le gouvernement rwandais a toujours démenti toute implication dans les attentats et dans les menaces proférées à l'encontre de ses opposants politiques et de ses détracteurs, et il a réagi avec indignation aux allégations selon lesquelles ces attentats pourraient avoir été commandités ou facilités à partir de Kigali.
Parfois, des responsables gouvernementaux rwandais ont tenté de discréditer les victimes ou d'insulter leur mémoire peu après leur mort, en particulier quand il s'agissait d'opposants directs du gouvernement.
Ainsi, réagissant à des allégations selon lesquelles le gouvernement rwandais pourrait avoir été à l'origine du meurtre du journaliste Charles Ingabire en Ouganda en novembre 2011, le président Kagame a déclaré à des journalistes: « C’est purement l’une des hypothèses et je ne crois pas que nous devons travailler sur une seule hypothèse et négliger les faits. C'est faux, absolument faux. » Affirmant que les autorités rwandaises détenaient des preuves qu'Ingabire avait détourné des fonds avant de s'enfuir en Ouganda, il a déclaré : « Nous avons beaucoup de cas comme celui-ci au Rwanda de gens qui commettent des crimes et affirment être victimes de persécution politique. » [2]
Plus récemment, à la suite de l'assassinat de Patrick Karegeya en Afrique du Sud en janvier 2014, le président rwandais, le Premier ministre et les ministres des Affaires étrangères et de la Défense ont tous eu des mots très durs, qualifiant Karegeya de traitre et d'ennemi et laissant entendre qu'il avait mérité son sort.
La ministre des Affaires étrangères, Louise Mushikiwabo, a écrit sur Twitter le 5 janvier 2014: « Peu importe comment vs commencez, ce qui compte c'est
comment vs finissez. Cet homme était un ennemi déclaré de mon gouv. & de mon pays, vs vs attendez à de la pitié? » Le lendemain, le Premier ministre, Pierre Damien Habumuremyi, a
tweeté:
« Trahir vos compatriotes et le pays qui a fait de vous un homme aura toujours des conséquences. »
Un article paru dans le journal News of Rwanda a cité ces propos du ministre de la Défense, James Kabarebe, lors d'un discours prononcé à Gisenyi le 11 janvier 2014: « Ne perdez pas votre temps sur des informations selon lesquelles untel ou untel a été étranglé avec une corde dans l'appartement numéro sept dans tel ou tel pays[3]… Si vous choisissez de vivre comme un chien, vous mourrez comme un chien et les éboueurs emporteront les ordures pour faire disparaître les odeurs. En fait, c'est le sort qui attend ceux qui ont choisi un tel chemin. Nous n'y pouvons rien et nous ne devrions pas avoir à répondre à des questions là-dessus. »[4]
De manière encore plus révélatrice, le président Kagame a semblé presque approuver le meurtre de Karegeya dans un discours public le 12 janvier 2014, lorsqu'il a dit:
« Quiconque trahit le pays en paiera le prix. Je vous l'assure. Si vous décevez un pays, si vous souhaitez du mal à son peuple, vous finirez par en subir les conséquences néfastes. Toute personne encore en vie qui complote contre le Rwanda, quelle qu'elle soit, en paiera le prix … Quelle qu’elle soit, c'est juste une question de temps ». Il a ajouté:
« J'entends certains des nôtres dire: ce n'est pas nous qui avons fait cela. C'est vrai que ce ne sont pas eux qui ont fait cela, mais ce n'est pas mon souci car vous devriez faire cela… Ce qui est étonnant, c'est que vous ne faites pas cela. Des gens qui osent trahir, trahir le pays! »Faisant allusion à une série d'attentats à la grenade commis à Kigali, dont le gouvernement avait précédemment accusé Karegeya et ses collaborateurs, il a dit: « Et nous devrions nous excuser? Jamais! »[5]
Le même jour, Kagame a tweeté: « Je n'ai pas à faire d'excuses au sujet d'individus qui ont oublié que c'est grâce au Rwanda qu’ils sont devenus qui ils sont, et qui tuent des personnes innocentes et des enfants » ; et « Ceux qui critiquent le Rwanda savent jusqu'où ils iraient pour protéger leur propre nation ».
Le rôle des gouvernements étrangers
Dans la plupart des cas, rien ne permet de supposer que les gouvernements des pays où vivaient les victimes se sont rendus en aucune manière les complices de ces attentats. Au contraire, ces incidents ont parfois mis à l'épreuve les relations diplomatiques entre le Rwanda et certains de ses plus importants alliés, comme le Kenya, l'Afrique du Sud et le Royaume-Uni.
La situation en ce qui concerne l'Ouganda est moins claire, essentiellement du fait du manque de transparence dans les efforts des autorités ougandaises pour enquêter et traduire en justice les auteurs d'attentats commis contre des Rwandais en Ouganda. Human Rights Watch n'a pas connaissance d'indices selon lesquels des autorités ougandaises ont été officiellement ou directement impliquées dans des incidents particuliers, à l'exception d'un cas au moins, dans lequel un policier ougandais de haut rang a facilité le rapatriement forcé au Rwanda d'un réfugié rwandais en Ouganda. Mais il est possible que les relations personnelles existant de longue date entre certains responsables ougandais et rwandais entravent l'accès à des informations sur des cas possibles de collusion pour faciliter la commission de ces crimes.
De nombreux Rwandais qui veulent s'enfuir choisissent d'abord l'Ouganda à cause de sa proximité. Mais ce pays est devenu l'un des moins sûrs pour les Rwandais qui fuient les persécutions politiques, en raison des liens étroits existant entre les services de police et de renseignement des deux pays. Les relations diplomatiques entre l'Ouganda et le Rwanda ont fluctué au cours des années mais de nombreuses autorités rwandaises de haut rang, en particulier celles qui ont été élevées en Ouganda et ont travaillé dans les forces de sécurité ou les services de renseignement ougandais, ont gardé des liens étroits avec ce pays. Il est donc très facile pour des agents rwandais d'opérer en Ouganda.
Par exemple, au cours des quatre dernières années, de nombreux réfugiés et demandeurs d'asile rwandais en Ouganda ont décrit à Human Rights Watch toute une série d'incidents, notamment des menaces personnelles proférées par des personnes dont ils savaient qu’il s’agissait de Rwandais, ou soupçonnaient que c’était le cas. Ils ont évoqué des attaques à leurs domiciles, des passages à tabac, des tentatives d'enlèvement et, dans les cas les plus graves, des meurtres ou tentatives de meurtre. Certains ont également affirmé avoir été menacés ou intimidés par des membres de la représentation diplomatique rwandaise en Ouganda.
Des réfugiés ou des demandeurs d'asile qui sont connus en tant qu'opposants politiques, critiques, ou journalistes en vue, sont particulièrement exposés aux risques. Par exemple, à la suite de l'élection présidentielle de 2010 au Rwanda, plusieurs membres de partis rwandais d'opposition et des journalistes qui avaient quitté le Rwanda pour des raisons de sécurité ont fait l'objet de menaces personnelles en Ouganda. La plupart d'entre eux se sont depuis lors réinstallés dans d'autres pays.
Des journalistes ougandais qui ont enquêté ou diffusé des informations sur les menaces contre la sécurité des Rwandais en Ouganda ont à leur tour exprimé des préoccupations concernant leur propre sécurité, en particulier en 2013.
Actions requises
Human Rights Watch appelle les gouvernements des pays hôtes à améliorer la protection des réfugiés et demandeurs d'asile rwandais dont les craintes pour leur sécurité en exil sont susceptibles d’être bien fondées. Human Rights Watch exhorte également ces gouvernements à effectuer des enquêtes approfondies sur les attentats commis et sur les menaces proférées contre des opposants et des critiques du gouvernement rwandais sur leur territoire, afin de traduire leurs responsables en justice. Pour sa part, le gouvernement rwandais devrait coopérer pleinement à ces enquêtes.
Les bailleurs de fonds et les gouvernements étrangers qui ont des relations avec le Rwanda devraient pousser à l'ouverture d'enquêtes approfondies sur ces incidents et à une pleine coopération du gouvernement rwandais avec les autorités des pays concernés.
Attentats et menaces contre des opposants et des détracteurs du gouvernement rwandais se trouvant à l’étranger : 1996 – 2014
6 octobre 1996 |
Assassinat de Théoneste Lizinde et d'Augustin Bugirimfura Théoneste Lizinde — un colonel du FPR, ancien parlementaire et ancien membre des services de renseignement sous le gouvernement du président Juvénal Habyarimana — et Augustin Bugirimfura, un homme d'affaires, ont disparu du domicile de Lizinde dans la capitale du Kenya, Nairobi, le 6 octobre 1996. Deux jours plus tard, leurs cadavres ont été retrouvés à la périphérie de Nairobi; ils avaient été tués par balles. |
Kenya |
16 mai 1998 |
Assassinat de Seth Sendashonga Seth Sendashonga était ministre de l'Intérieur du gouvernement formé par le FPR après le génocide. Après avoir contesté certaines politiques du FPR et protesté contre des violations des droits humains, il a démissionné en août 1995 et s'est enfui au Kenya. En exil, il a critiqué plus ouvertement le gouvernement et a fondé un mouvement d'opposition. Après avoir survécu à une tentative d'assassinat le 26 février 1996, dans laquelle son neveu et lui ont été blessés, il a été abattu à Nairobi en mai 1998, ainsi que son chauffeur.[6] Trois hommes (un Rwandais et deux Ougandais) ont été arrêtés et inculpés de complot et de meurtre. Ils ont été jugés par un tribunal kenyan, déclarés non coupables et remis en liberté. Dans une déclaration le 31 mai 2001, un juge de la Haute Cour kenyane s'est dit persuadé que le meurtre de Sendashonga était un assassinat politique et a affirmé qu'aucune preuve ne permettait de relier les trois accusés et les « indices politiques ».[7] Un homme travaillant à l'ambassade du Rwanda à Nairobi a été arrêté en rapport avec la tentative d'assassinat de 1996, mais l'enquête kenyane a été compromise par le manque de coopération du gouvernement rwandais, qui a refusé de lever son immunité diplomatique. Le suspect a été remis en liberté sans procès. Photo © ISCID |
Kenya |
7 avril 2003 |
Disparition de Léonard Hitimana Léonard Hitimana, député du Mouvement démocratique républicain (MDR), un parti d'opposition, a disparu le 7 avril 2003 après avoir quitté le domicile d'un autre parlementaire du MDR à Kigali, la capitale rwandaise. La police rwandaise a indiqué que sa voiture avait été retrouvée à proximité de la frontière ougandaise. Le sort d'Hitimana n'est toujours pas connu.[8] |
Rwanda/ Ouganda |
23 avril 2003 |
Disparition d'Augustin Cyiza Le lieutenant-colonel Augustin Cyiza, officier militaire démobilisé, militant des droits humains, ancien président de la Cour de Cassation et vice-président de la Cour Suprême, a disparu en avril 2003. Il a été vu pour la dernière fois à Kigali mais son véhicule aurait été retrouvé à proximité de la frontière ougandaise. Son sort est toujours inconnu.[9] |
Rwanda/ Ouganda |
19 juin 2010 |
Tentative d'assassinat de Kayumba Nyamwasa Le général Kayumba Nyamwasa, un ancien responsable militaire rwandais de haut rang, a échappé de peu à une tentative d'assassinat à Johannesburg le 19 juin 2010. Il a été grièvement blessé mais a survécu. Le procès de six personnes (dont trois Rwandais) accusées d'être impliquées dans cet attentat était en cours en Afrique du Sud à l'heure de la rédaction de ces lignes. Nyamwasa était un membre clé du FPR depuis la période où il s’agissait d’un mouvement rebelle en Ouganda, avant le génocide de 1994 au Rwanda. Proche allié de Paul Kagame depuis le début des années 1990, il a tenu des postes élevés dans la hiérarchie de l'armée, des services de renseignement et de la gendarmerie. En tant que chef d'état-major de l'armée à la fin des années 1990, il a joué un rôle de premier plan dans les opérations anti-insurrectionnelles contre des éléments de l'ancienne armée rwandaise et des milices – dont certains avaient participé au génocide en 1994 – qui effectuaient des incursions au Rwanda à partir de la République démocratique du Congo voisine. Au cours des années suivantes, les relations entre Nyamwasa et Kagame se sont détériorées. Nyamwasa a été marginalisé et nommé ambassadeur en Inde en 2004. En février 2010, après un retour de courte durée au Rwanda, il s'est enfui en Afrique du Sud où il a demandé l'asile et est devenu un détracteur virulent de Kagame. Avec plusieurs autres anciens responsables de haut rang du FPR (dont Patrick Karegeya – cf le chapitre janvier 2014 ci-dessous), Nyamwasa a constitué un mouvement d'opposition en exil, le Congrès national rwandais (Rwanda National Congress, RNC). En janvier 2011, Nyamwasa, Karegeya et deux autres membres fondateurs du RNC (Théogène Rudasingwa, ancien secrétaire général du FPR et chef de cabinet de Kagame, et Gerald Gahima, ancien procureur général, tous deux exilés aux États-Unis) ont été jugés par contumace par un tribunal militaire à Kigali. Ils ont été déclarés coupables d'atteinte à la sécurité de l'État, atteinte à l'ordre public, divisionnisme, diffamation et formation d’un réseau criminel. Nyamwasa et Rudasingwa ont été condamnés à 24 ans de prison chacun et Karegeya et Gahima à 20 ans. Photo © 2012 Reuters |
Afrique du Sud |
Mai 2011 |
Menaces à l'encontre de René Mugenzi et Jonathan Musonera En mai 2011, deux Rwandais vivant au Royaume-Uni – René Mugenzi et Jonathan Musonera – ont été avertis par la Police métropolitaine de Londres de l'existence de menaces à leur sécurité émanant du gouvernement rwandais. Mugenzi et Musonera ont des liens avec l'opposition rwandaise en exil mais ne sont pas eux-mêmes des opposants renommés ou en vue. Mugenzi est un ancien militaire du FPR et membre du RNC. Mugenzi s'est exprimé en public sur les violations des droits humains au Rwanda, y compris dans les médias britanniques et sur Twitter. Un troisième Rwandais vivant au Royaume-Uni, Noble Marara, lui aussi lié à l'opposition en exil, a affirmé avoir également reçu des menaces. Auparavant, un certain nombre de réfugiés rwandais avaient indiqué avoir été intimidés et harcelés par des membres de la représentation diplomatique rwandaise au Royaume-Uni, en particulier lorsqu'ils avaient tenté d'organiser des réunions publiques sur le Rwanda. Photo © Privé |
Royaume-Uni |
30 novembre 2011 |
Meurtre de Charles Ingabire Un journaliste rwandais en exil, Charles Ingabire, a été tué par balles dans la capitale ougandaise, Kampala, le 30 novembre 2011. Rescapé du génocide au Rwanda, il s'était enfui en Ouganda en 2007. En exil, il avait écrit des articles pour Umuvugizi, un journal populaire rwandais dont la publication a été suspendue par le Haut Conseil des médias rwandais en 2010 mais qui a continué à paraître en ligne. Au moment de sa mort, Ingabire était rédacteur en chef de la publication en ligne Inyenyeri News. Certains de ses articles étaient très critiques du gouvernement. Il avait rejoint le RNC mais n'en était pas un membre de premier plan. Il avait survécu à un premier attentat environ deux mois avant son assassinat et avait informé des amis qu'il avait reçu des menaces à plusieurs reprises.[10] À la suite du meurtre d'Ingabire, la police ougandaise a affirmé qu'elle enquêtait sur l'affaire et a placé deux personnes en détention pour interrogatoire. Toutefois, jusqu'à présent, personne n'a été inculpé du meurtre d'Ingabire. Photo © Privé |
Ouganda |
22 août 2012 |
Attentat contre Frank Ntwali Frank Ntwali est le beau-frère de Kayumba Nyamwasa et le président du RNC en Afrique du Sud, où il vit depuis plusieurs années. Le 22 août 2012, il a été attaqué dans sa voiture dans les environs de Johannesburg et a reçu plusieurs coups de couteau. Il a été blessé mais a survécu. Ntwali devait comparaître en qualité de témoin, devant un tribunal sud-africain, au procès de personnes accusées d'avoir tenté d'assassiner Kayumba Nyamwasa. |
Afrique du Sud |
25 octobre 2013 |
Retour forcé de Joël Mutabazi et autres cas liés
Le 25 octobre 2013, un ancien garde du corps présidentiel rwandais, Joël Mutabazi, réfugié en Ouganda, a disparu d'un lieu où il vivait sous protection policière ougandaise 24 heures sur 24 à Kampala. Son sort est resté inconnu pendant six jours. Le 31 octobre, la police rwandaise a confirmé qu'il était détenu au Rwanda mais a refusé de divulguer son lieu de détention. Le 13 novembre, il a comparu devant un tribunal militaire à Kigali, en compagnie de 14 co-accusés, sous l'inculpation de terrorisme et d'autres crimes. Trois autres co-accusés ont comparu lors d'une seconde audience. Parmi ses co-accusés, figurent au moins deux autres Rwandais qui ont disparu en Ouganda: le jeune frère de Mutabazi, Jackson Karemera, disparu à Kampala aux alentours du 25 octobre, et un autre ancien garde du corps présidentiel rwandais, Innocent Kalisa, qui avait été porté disparu à Kampala en août. Le gouvernement et la police ougandais ont accusé le directeur adjoint du Directorat ougandais des enquêtes criminelles et des renseignements, Joel Aguma, d'avoir livré « par erreur » Mutabazi aux autorités rwandaises sans suivre les procédures d'extradition appropriées. Selon la police ougandaise, Aguma a été suspendu de ses fonctions, dans l'attente des résultats d'une enquête. Human Rights Watch n'a connaissance d'aucune autre mesure prise par les autorités ougandaises concernant cette affaire. Avant son retour forcé au Rwanda, Mutabazi avait échappé à une tentative d'assassinat, ainsi qu'à une tentative ratée d'enlèvement, toutes deux en Ouganda. En juillet 2012, un homme armé s'est présenté à la résidence où il vivait alors et a tiré sur lui, mais l'a manqué. Le 20 août 2013, des hommes armés l'ont enlevé alors qu’il se trouvait dans une résidence sécurisée dans une banlieue de Kampala, où il avait été installé par précaution après la tentative d'assassinat. Il a été libéré le même jour, grâce à une intervention de la police ougandaise. Mutabazi avait été arrêté au Rwanda en 2010 et détenu dans un camp militaire, où il avait été maintenu au secret pendant plusieurs mois et torturé. Les autorités rwandaises le soupçonnaient d'être proche de Kayumba Nyamwasa.[11] Photo © 2012 Jerome Starkey |
Ouganda |
1er janvier 2014 |
Meurtre de Patrick Karegeya Patrick Karegeya, ancien chef des services de renseignement extérieurs du Rwanda de 1994 à 2004, a été trouvé mort dans une chambre d'hôtel à Johannesburg le 1er janvier 2014. La police sud-africaine a ouvert une enquête. Karegeya avait été emprisonné deux fois au Rwanda, en 2005 et 2006,[12]avant de s'enfuir en Afrique du Sud où il vivait depuis 2007. Après que Kayumba Nyamwasa l'eut rejoint en Afrique du Sud en 2010, les deux hommes avaient fondé ensemble le RNC. Depuis lors, Karegeya avait formulé très ouvertement ses critiques du gouvernement rwandais et du président Kagame. Photo © 2012 AP |
Afrique du Sud |
[1]Ce document ne couvre pas les nombreux cas de violations des droits humains commises contre des Rwandais à l'intérieur du Rwanda depuis que le FPR a pris le pouvoir. Human Rights Watch a publié de nombreux rapports et communiqués de presse sur ces affaires. Voir https://www.hrw.org/fr/africa/rwanda. L'une des périodes les plus sombres de ces dernières années a été celle qui a précédé l'élection présidentielle de 2010, lorsqu'un journaliste indépendant et le vice-président d'un parti d'opposition ont été assassinés et plusieurs autres opposants et détracteurs ont été arrêtés et menacés. Pour consulter une chronologie de ces événements, lire Human Rights Watch, « Rwanda: atteintes à la liberté d'expression, d'association et de réunion à l'approche de l'élection présidentielle, janvier - juillet 2010» (août 2010), https://www.hrw.org/fr/news/2010/08/02/rwanda-atteintes-aux-libert-s-d-expression-d-association-et-de-r-union-l-approche-de.
[2]Agence France Presse, reprise par Capital FM (Kenya), « Kagame denies any link to Kampala journalist murder » (« Kagame dément tout lien avec le meurtre d'un journaliste à Kampala »), 12 décembre 2011, http://www.capitalfm.co.ke/news/2011/12/kagame-denies-any-link-to-kampala-journalist-murder/
[3]Il s'agit là d'une allusion apparente à des informations selon lesquelles Karegeya aurait été étranglé.
[4]News of Rwanda, « Gen Kabarebe on Karegeya: ‘When you choose to be a dog, you die like a dog’», 11 janvier 2014, http://www.newsofrwanda.com/featured1/21824/gen-kabarebe-on-karegeya-when-you-choose-to-be-dog-you-die-like-dog/
[5]Traduction du kinyarwanda. Pour lire l'intégralité du discours de Kagame prononcé à l'occasion du National Leaders’ Prayer breakfast, le 12 janvier 2014, suivre le lien http://paulkagame.tv/podcast/?p=episode&name=2014-01-12_kagame_.mp3Des extraits de son discours ont aussi été diffusés par plusieurs stations de radio rwandaises. Bien que Kagame n'ait pas mentionné le nom de Karegeya, il n'y a guère de doute que ses propos se rapportaient à lui et à son assassinat.
[6]Pour davantage de détails, voir « Human Rights Watch et la FIDH condamnent l’assassinat de Seth Sendashonga », communiqué conjoint de Human Rights Watch et la FIDH, 19 mai 1998, http://www.fidh.org/IMG/article_PDF/article_a1208.pdf
[8]Pour davantage de détails, voir le rapport de Human Rights Watch intitulé, « La préparation des élections: Resserrer l'étau au nom de l'unité », mai 2003, http://www.hrw.org/fr/reports/2003/05/08/la-pr-paration-des-lections.L'opinion la plus répandue est que Hitimana a probablement été tué au Rwanda, mais son cas est inclus ici en raison de la possibilité d'un lien avec l'Ouganda.
[9]Pour davantage de détails, voir le rapport de Human Rights Watch, « La préparation des élections: Resserrer l'étau au nom de l'unité » mai 2003, http://www.hrw.org/fr/reports/2003/05/08/la-pr-paration-des-lections.Comme dans le cas de Hitimana, l'opinion prévaut que Cyiza a probablement été tué au Rwanda.
[10]Pour davantage de détails, voir « Ouganda/Rwanda : Il faut enquêter sur le meurtre d'un journaliste », 6 décembre 2011, communiqué de presse de Human Rights Watch,
https://www.hrw.org/fr/news/2011/12/06/ougandarwanda-il-faut-enqu-ter-sur-le-meurtre-dun-journaliste.
[11]Pour davantage de détails sur le retour forcé de Mutabazi d'Ouganda vers le Rwanda, voir le communiqué de presse de Human Rights Watch intitulé « Ouganda/Rwanda: Un retour forcé vers le Rwanda soulève des inquiétudes graves », le 4 novembre 2013, http://www.hrw.org/fr/news/2013/11/05/ouganda-rwanda-un-retour-force-vers-le-rwanda-souleve-des-inquietudes-graves.
[12]Pour davantage de détails sur l'arrestation et le procès de Karegeya au Rwanda, voir le rapport de Human Rights Watch intitulé « La loi et la réalité: Les progrès de la réforme judiciaire au Rwanda » , pps 70-71, https://www.hrw.org/fr/reports/2008/07/25/la-loi-et-la-r-alit.