"Katanga business" censuré: Thierry Michel arrêté à Kisangani
Thierry Michel a expliqué à la RTBF la manière dont la projection de son film "Katanga Business" a été interrompue lundi à Kisangani. Il a été emmené dans les locaux de la Sureté. "C'est une censure brutale et menaçante", selon lui.
Le réalisateur belge Thierry Michel achève ces jours-ci une tournée au Congo avec son dernier film, "Katanga Business". C’est un documentaire qui met en évidence la richesse
de la grande province minière, les luttes d'intérêt et les conflits sociaux qu'elle génère.
Comme ses autres films, "Katanga Business" suscite intérêt et débats en République démocratique du Congo. Mais, alors que tout s'est bien passé lors des 20 premières projections dans différentes villes, à Kisangani dans l'Est, le film a été interdit de projection et Thierry Michel a été brièvement interpellé.
Il a expliqué à Françoise Nice que "deux heures avant la projection, le film a été interdit par les autorités académiques, en disant que ça ne faisait pas partie du cursus universitaire et que cela allait distraire les étudiants. Après on nous a aussi dit que les services spéciaux avaient estimé que le film n'était pas bon et qu'en plus c'est un film politique.
Mais, ce qui est plus impressionnant, après j'ai été convoqué, enfin on est venu me chercher à l'hôtel, pour m'amener à l'ANR, la Sûreté nationale. Enfin, les gens ont été polis.
Mais le soir, le plus grave, c’est que la projection au centre culturel de Kisangani (qui est subventionné par la Coopération belge, par Africalia et par la Communauté française) a brutalement été interrompue, avec obligation de quitter les lieux extrêmement rapidement. Le courant a été coupé. Même des députés ont été obligés de quitter la salle et il semble que des militaires soient venus vérifier si on avait bien quitté les lieux après. Là, ça a été la censure brutale et menaçante.
Moi, je vais quitter le Congo, mais mes collaborateurs congolais, qui sont sur le terrain, vont continuer à essayer de travailler et il y a eu vis-à-vis d'eux, des choses qui ont été dites et qui étaient inadmissibles".
Excès de zèle
Thierry Michel estime que "c'est peut-être à la Communauté française de demander des explications. Mais je pense que c'est le fait d'un excès de zèle, dans une province. Je ne suis pas sûr que ça ait été une décision vraiment nationale ou gouvernementale. Je pense d'ailleurs que beaucoup de dirigeants congolais sont ulcérés de l'image que ça va donner du pays.
C'était la semaine même où la Coopération belge était là pour faire une évaluation de projet et définir, avec les autorités locales, les nouvelles perspectives de coopération, donc de financement belge. Mais dans ce lieu qui est financé par la Belgique, on interrompt des projections et on fait sortir les gens. Et on m'interpelle pour aller à la sûreté, donc il y a une incohérence flagrante. On ne peut pas avoir le beurre et l'argent du beurre".
(A.L. avec F. Nice)