Vient de paraître: Religions et Pouvoir politique au Rwanda. Textes introduits et commentés pour l’histoire
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L'auteur nous donne les grandes lignes de son livre:
Question : Pourquoi ce livre ?
Dr. Phil. I. Nsengimana : Les rapports entre l’État, les religions, l’Église et les populations à évangéliser ont été présentés de diverses manières et le plus souvent dans une dialectique controversée. Le Rwanda n’a pas échappé à cette règle. L’analyse de ces rapports a conduit à des polémiques multiples et multiformes. L’une de celles-ci qui a motivé la conception du présent ouvrage, est apparue en 2016: les médias demandaient « le repentir a minima » de la Conférence épiscopale rwandaise face au rôle que l’Église catholique aurait joué dans le génocide de 1994. Pour certains, « la demande de pardon des évêques de 2016 reste incomplète » ; pour « le collège d‘évêques, ces excuses ne concernent pas l‘église catholique en tant qu’institution, mais plutôt ses fidèles ». Et l’évêque Philippe Rukamba, Président de la Conférence épiscopale rwandaise de l’époque d’affirmer : « l’Église n’a pas participé au génocide, et elle ne l’a ‘jamais commandité‘. »
Ce sont là les quelques considérations qui me poussèrent à mettre encore mon nez dans l’histoire et à écrire ce livre : Religions et Pouvoir politique au Rwanda. Textes introduits et commentés pour l’histoire.
Dans ma publication de 2003, j’ai mentionné les rapports entre les religions, l’Église catholique hiérarchique, l’État et les populations au Rwanda et leurs effets sur la société rwandaise pendant la période coloniale. Le présent ouvrage vient compléter les éléments que j’ai fournis en 2003. A la lumière des sources consultés, je fais une mise au point sur la nature desdits rapports avec une plus-value que j’étends l’étude à la période postcoloniale. Aussi, je montre le caractère religieux et socio-politique du Rwanda précolonial.
Pour ces différentes périodes, j’identifie les acteurs politiques et religieux qui les ont marquées, et, sur base des sources variées, je réponds à la question : Qui a fait quoi ? Cette démarche permet de relever les faits et gestes des acteurs religieux et politiques non seulement durant la période de guerre de 1990 à 1994 qui culmina au génocide, mais aussi au cours des périodes précoloniale, coloniale et postcoloniale qui l’ont précédée.
Question : Que pensez-vous des accusations qui sont portées contre l’Église catholique ?
Dr. Phil. I. Nsengimana : La lecture objective des faits et gestes retrouvés montre que la plupart des accusations qui sont formulées contre l’Église en tant qu’institution ne sont pas sincères ; elles sont des exagérations voire des contrevérités. Elle permet aussi, non seulement de mesurer l’ampleur des pertes en vies humaines dont cette institution a souffert (quatre évêques assassinés, de nombreux religieux et religieuses tués,…), mais aussi de saisir la profondeur de l’engagement des évêques, prêtres et laïcs dans la dénonciation des injustices, des inégalités et de la violence qui ont marqué le Rwanda postcolonial jusqu’en 1994 et surtout pendant la période de guerre, de 1990 à 1994. Les faits et gestes relevés ont également montré que certains chrétiens se sont écarté des valeurs de l’Évangile pour commettre des actes qui ont porté atteinte à la dignité de la personne humaine. Enfin de compte, les faits retrouvés montrent une autre facette de l’histoire de l’Eglise catholique hiérarchique au Rwanda que les accusateurs veulent, consciemment ou inconsciemment occulter. Avant et pendant la guerre déclenchée le 1er octobre 1990, l’épiscopat catholique rwandais a prêché la paix, la charité et l’amour fraternel ; tout simplement il n’a pas été écouté.
La contestation des accusations globalisantes contre l’Église catholique en tant qu’institution a été aussi évoquée avant moi par d’autres historiographes rwandais dans le but de restituer la vérité historique. C’est par souci de participer à cette tâche, qu’il faut placer le présent ouvrage : une contribution qui n’ambitionne pas d’être exhaustive mais plutôt une synthèse de données historiques sur les religions et le pouvoir politique au Rwanda, susceptibles de contribuer au rétablissement de la vérité historique.
Question : Comment avez-vous procédé pour arriver à cette synthèse ?
Dr. Phil. I. Nsengimana : Cette synthèse s’est réalisée sur base de l’analyse de tous les apports connus et accessibles se rapportant aux religions et au pouvoir politique qui ont marqué le territoire occupé par le Rwanda actuel. Toutes les sources furent mises à contribution : les Diaires, les Rapports Annuels des missions, les revues spécialisées des missions, les Correspondances entre les missionnaires, la linguistique comparative, le code ésotérique des bami du Rwanda, les généalogies dynastiques, les poésies dynastiques… Il a été également indispensable de sortir de cet espace de 26.338 km² que couvre le Rwanda actuel pour naviguer dans cette aire géographique et culturelle qu’est la zone interlacustre afin de mieux cerner les manifestations religieuses qui ont caractérisé la société rwandaise avant qu’elle n’accueille les missionnaires Pères Blancs.
Question : Quels sont les thèmes essentiels sur lesquels s’articule votre livre ?
Dr. Phil. I. Nsengimana : Dans mon cheminement, j’identifie les faits qui ont marqué les rapports entre les religions, l’Église catholique hiérarchique, les populations et les autorités politiques du Rwanda précolonial, colonial et postcolonial. Je reviens aussi sur les rapports entre l’Église catholique hiérarchique et les acteurs politique d’aujourd’hui. Eu égard aux faits relevés, force est de constater que l’Église catholique hiérarchique actuelle se montre plus silencieuse que critique et prophétique. Elle ferme les yeux face aux problèmes qui accablent les populations et au radicalisme qui s’installe petit-à-petit dans les esprits.
Cet état de fait devrait interpeller toutes les personnalités de bonne volonté et épris de paix et de justice, y compris l’épiscopat actuel du Rwanda. Malheureusement, ce dernier reste muet. Aujourd’hui plus qu’hier, on remarque que du côté de cet épiscopat des signes du changement faisant de l’Église catholique la voix des sans-voix font de plus en plus place à des manifestations de soutien aux programmes politiques et à des panégyriques outranciers des institutions politiques. En d’autres mots, son inféodation à l’État est en marche. Les raisons de ce dangereux processus ainsi que les actions à entreprendre afin de rallumer et de renforcer le prophétisme de l’Église catholique au Rwanda sont présentées et décrites dans le présent ouvrage. Il est souhaitable qu’elles servent d’inspiration à tous les intervenants actifs dans les rapports entre l’Église catholique hiérarchique et les autorités politiques afin qu’ils se ressaisissent et rectifient le tir. C’est du moins mon vœu ardent en tant qu’auteur du livre… ; il est souhaitable que cette inféodation n’aille pas jusqu’au bout car, lorsque l’État s’empare de l’Église ou de la religion, on assiste à l’indicible pour la société…
Editions Sources du Nil
Collection Pyramides