La fessée
Rétrospective 2013
Association de malfaiteurs : gare à l’explosion de l’EAC
« Ndi umunyarwanda » : « je suis Tutsi, tu es Hutu, tu dois t’agenouiller ou… mourir »
Jamais dans l’histoire du Rwanda un président tanzanien n’avait haussé le ton contre le Rwanda, mais il a fallu la menace de Kagame qui envisageait de « frapper » Kikwete, pour provoquer l’ire de ses concitoyens généralement mesurés dans leurs propos, jamais provocateurs à ce point. En comparant le dictateur chéri par les Occidentaux à Idi Amini Dada, tout le monde s’est souvenu que la Tanzanie n’était pas inoffensive et gare au dictateur qui veut jouer la provocation, Idi Amin l’a appris à ses dépens.
Mais tout cela avait une raison. Le Président Kikwete, las du chaos entretenu par le Rwanda et l’Ouganda dans la région des Grands Lacs, avait proposé des négociations entre les régimes rwandais et ougandais avec leurs rébellions respectives. Alors que l’Ouganda a accueilli cette proposition fraîchement par une entourloupe dont le Président Museveni possède les secrets, le brutal Président rwandais Paul Kagame a montré ses muscles avec des menaces visant directement Jakaya Kikwete le magnifique. Tollé dans les médias tanzaniens qui se sont chargés de montrer à Kagame que face au géant tanzanien, le Rwanda n’était qu’un gamin mal élevé qui méritait une correction exemplaire. Nous avions l’habitude de dire que Paul Kagame fait ce qu’il dit et dit ce qu’il fait, Jakaya Kikwete, quant à lui, n’a pas besoin de le dire, il le fait. Ayant engagé ses troupes au sein de la MONUSCO aux côtés des Sud Africains eux aussi fatigués de l’impertinence du Rwanda, Jakaya Kiwete a défait le M23 sous-fifre de l’armée rwandaise (RDF), mettant ainsi fin au chaos dans l’Est de la RDC qui régnait dans cette région depuis la chute de Mobutu.
Du coup Paul Kagame a boudé toutes les rencontres internationales jusqu’à la grand’messe où tous les grands de ce monde se sont réunis pour honorer la mémoire de Nelson Mandela en Afrique du Sud ! Paul Kagame a préféré se rendre aux Etats-Unis à un dîner offert par son mentor Rick Warren, qui à l’occasion avait offert une petite enveloppe au Gouvernement rwandais, pour ne pas dire à Kagame lui-même. On l’a vu au cours de cette semaine d’hommage à Mandela, faire la queue comme un homme ordinaire pour voir le cercueil de Madiba. Mais la raison c’était que s’il avait eu le choix, il aurait évité de se rendre en Afrique du Sud qui, avec la Tanzanie, venaient de lui administrer une raclée mémorable dans l’Est du Congo. Aussi ne pouvait-il pas assister à la grand’messe en mémoire de Mandela ni se rendre à l’enterrement, par peur de rencontrer certaines personnalités qui n’auraient pas hésité de lui reprocher d’avoir soutenu le M23 défait, par peur également d’entendre Obama répéter ce qu’il avait déjà dit à Accra en 2009 que l’Afrique n’avait « pas besoin d’hommes forts mais de fortes institutions » et qu’ « il est toujours trop facile à des individus sans conscience d'entraîner des communautés entières dans des guerres entre religions et entre tribus » (suivez mon regard !). Obama le redira en d’autres mots : « There are too many leaders who claim solidarity with Madiba’s struggle for freedom, but do not tolerate dissent from their own people. And there are too many of us who stand on the sidelines, comfortable in complacency or cynicism when our voices must be heard ». C’est bien cela que Kagame ne voulait plus entendre surtout qu’il venait de faire condamner son opposante Victoire Ingabire Umuhoza à 15 ans de prison ferme sur des accusations imaginaires, victime collatérale de la bérézina kagaméenne au Congo.
Mais le Président Américain aura fait beaucoup plus qu’il n’avait dit surtout pour l’Afrique de l’Est. En évitant la poignée de main avec son homologue et compatriote kényan qui, rattrapé par les violences post-électorales de 2007 dont il doit répondre devant la CPI, a choisi le camp des lascars Kagame-Museveni, Obama a montré clairement qu’il soutenait la Tanzanie et l’Afrique du Sud dans leur action au sein de la Monusco en leur rendant visite juste avant le décès de Mandela. En cela il a failli faire exploser la Communauté des pays d’Afrique de l’Est, l’EAC, où la Tanzanie (et le Burundi) s’est vu exclure de quelques rencontres de l’EAC par la bande des 3, mais elle a finalement réapparu lors de la signature du protocole d’union monétaire et de la validation du français comme langue de la communauté en plus de l’anglais et du swahili. L’on se souvient ici que Paul Kagame a banni l’usage du français comme langue d’enseignement au Rwanda ! Donc pour Kagame, retour à la case départ ! Mais pour Kikwete, la Tanzanie a tellement investi dans l’EAC que personne ne peut la tenir à l’écart. N’empêche qu’il pense à renforcer l’alliance avec le Burundi et la RDC pour constituer l’axe politico-économique Dar-es-Salaam-Matadi et contrebalancer l’association de malfaiteurs Kagame-Kaguta-Kenyatta.
L’année 2013 aura été une « annus horribilis » militaire pour Paul Kagame. Est-ce la fin de ses escapades militaires dans l’Est du Congo pour le pillage des ressources naturelles du Congo, l’avenir nous le dira. En ce début d’année 2014, il semble qu’il se tourne vers la préparation du 20ème anniversaire du génocide qu’il a lui-même préparé et provoqué par l’assassinat du Président Habyarimana le 6 avril 1994. Cette préparation commence déjà par une incongruité « Ndi umunyarwanda », campagne pour la rwandité, mais qui sous prétexte de rassembler tous les Rwandais en refusant les appartenances ethniques, n’en est pas moins ethniquement divisionniste. Le Président Kagame lui-même, le 30 juin 2013, a exigé que les Hutus demandent pardon pour un génocide qui a été perpétré « en leur nom » : « Même si tu n’as pas tué, lèves-toi pour demander pardon pour ceux qui ont tué en ton nom. » Comment ne pas voir dans cette phrase une culpabilisation collective des Hutus, surtout qu’il le disait aux jeunes qui n’ont pas vécu cette période. Comment ne pas voir dans ces paroles une volonté, de la part du gouvernement, de semer la zizanie entre les deux ethnies, arme que le gouvernement actuel a toujours utilisé pour se maintenir au pouvoir, afin de « protéger les Tutsis » ? Comment demander à un Rwandais d’être plus Rwandais en pliant l’échine, en refusant son identité, alors que c’est l’identité qui fonde l’appartenance à la nation. L’occasion serait peut-être de faire campagne pour la réconciliation et de faire en sorte que tous les criminels toutes ethnies confondues comparaissent devant la justice. Mais cela, Paul Kagame le sait, il serait le premier visé.
La patrie est inaliénable, que l’on soit voleur, criminel, bandit de grand chemin ou citoyen honnête, on a tous une origine, un lieu de naissance et cela personne ne peut le changer ! Sauf à ceux qui acquièrent nouvellement cette nationalité, autrement dire aux Rwandais qu’ils sont Rwandais, on ne leur apprend rien de nouveau. Ce que peut-être on n’a pas compris, c’est que sous ce thème de « rwandité » normalement rassembleur, le régime rwandais fais des exclusions : « Je suis Rwandais, et toi tu ne l’es pas et prends garde je vais te faire la fête ! ». Autrement dit « moi je suis Tutsi et toi tu ne l’es pas, donc tu n’as droit à rien et prends garde je vais te tuer ! ». L’histoire de la petite cuillère qui a vidé un océan ! L’on sait par l’histoire que le nom « Rwanda » est rattaché à la monarchie féodale tutsie, auparavant maîtres d’une petite principauté ainsi dénommée, pas plus grande que 2000km2 autour du Lac Muhazi. Ce nom s’est étendu sur tout le territoire conquis actuel d’environ 26.000 km2 que le pouvoir actuel veut dominer sans partage, en tous cas pas avec les Hutus qui doivent s’agenouiller perpétuellement pour demander pardon, ou… mourir.
© www.editions-sources-du-nil.com
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