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 Editions Sources du Nil  : Livres sur le Rwanda, Burundi, RDCongo

Pygmées et bantous font bon ménage

1 Juillet 2009 , Rédigé par Editions Sources du Nil Publié dans #Histoire - politique

  Pendant qu'au Rwanda persiste la légende que la femme pygmée "umutwakazi" guérit du mal de dos, ailleurs ces préjugés ethnistes et machistes n'existent plus! Le conflit hutu/tutsi au Rwanda a dépassé toutes les limites de sorte que l'on ne parle plus de la troisième composante de la population: les Batwa largement minoritaires (1%) selon divers recensements. Reconnus comme d'habiles musiciens, ils ont été petit-à-petit marginalisés au fil du temps. Ils vivent la plupart du temps en petits groupés isolés du reste de la population et exposés à une forte consanguinité. Ils n'ont presque plus actuellement droit à la parole, le régime de Paul Kagame leur ayant refusé, sous prétexte de bannir les identités ethniques - du moins sur le papier - de s'identifier comme les véritables autochtones du Rwanda, pour défendre leur minorité ethnique.


Centrafrique : des filles pygmées courtisées par des Bantous

(Syfia Centrafrique) Dans les villages forestiers du sud-ouest de centrafricain, les mariages entre Bantous et filles pygmées ne choquent plus aujourd’hui. Les deux communautés se connaissent mieux et les discriminations reculent, même si certains préjugés ont encore la vie dure.

Révolution des mentalités dans le sud-ouest de la Centrafrique. Depuis environ quatre ans, les Bantous à la recherche d’âmes sœurs font les yeux doux aux filles pygmées. "Je n'ai plus de problèmes dans mon foyer depuis que je suis avec ma femme-ci", se félicite Robert Atrone, un Bantou de la Lobaye (180 km environ à l'ouest de Bangui), le regard tourné vers son épouse aka. Le groupe aka constitue le plus important groupe pygmée du pays. Robert s’est uni à sa femme il y a trois ans, après deux mariages ratés avec des filles de son ethnie, dont il a divorcé. "Aujourd'hui, il n'y a plus de honte pour un Bantou à avoir pour femme une Aka", assure François de la même localité, polygame de deux représentantes de cette même communauté.
Quand la fille convoitée accepte le mariage, le fiancé et son père discutent de la dot. "La dot d'une Pygmée ne représente pas grand-chose ; elle est simplement symbolique", explique Abel Kotton, directeur du Centre de référence des traditions orales des Pygmées aka (Cretopa). Une hache, du miel et 1 000 Fcfa (environ 1,5 €)… Il faudrait compter cent fois plus pour épouser une fille bantoue du même village ! Pour Robert Gbéda, député de la région, les filles aka ont un autre atout : "Pour préparer le repas familial, elles, qui maîtrisent la technique de la cueillette, amènent presque tout de la forêt. Le mari, lui, n'a qu'à acheter le sel et peut apporter de la viande."


Pygmées épanouies

De leur côté, les femmes pygmées trouvent aussi des avantages à épouser un Milou (nom donné à un ou une Bantou ; Bilou au pluriel). "Nous aimons les maris bilou, car ils nous achètent de beaux habits et des crèmes que nous ne pourrions jamais avoir si on vivait avec des Aka", confie Rose Gbangou. Entre des hommes qui recherchent des épouses dociles et travailleuses et des femmes en quête de sécurité matérielle, les unions ne seraient donc que d’intérêt et peu épanouissantes. Pas forcément à en croire Paul Grebodé. Ce chef pygmée se réjouit de ce qu'une Aka, dont le mari est milou, puisse aujourd'hui prendre la parole au sein d’un groupe de femmes bantoues et participer aux manifestations nationales. Elle peut aussi désormais être membre d’une tontine, intégrer l'Église de son mari et adhérer à des organisations de femmes chrétiennes, très répandues dans la Lobaye. De belles avancées !
Difficile d'imaginer de tels mariages mixtes dans d'autres régions d'Afrique centrale. Selon une étude de l’Institut de recherches socio-anthropologiques de l’Université catholique d’Afrique centrale publiée en 2005, dans le nord du Congo, "un homme qui a des relations sexuelles avec une Pygmée est banni et il n’a plus le droit d’en avoir avec une Bantoue". Dans le sud-ouest de la Centrafrique, ce brassage ethnique a été rendu possible grâce aux campagnes menées depuis une dizaine d'années par des Églises chrétiennes, des associations de défense des droits de l'homme et des organisations non gouvernementales à l'instar de Coopi (Cooperazione internazionale). Cette Ong italienne a diffusé les droits de l’homme dans les communautés bantoues et les communautés aka dont elle a formé certains leaders et valorisé la culture.

Des clichés malgré la cohabitation

Ces actions commencent à faire changer le regard des populations sur les Pygmées, jusque-là traités en "sous-hommes", juste bons à servir les Bantous, leurs "maîtres". La cohabitation pacifique dans des villages et les mariages mixtes de plus en plus fréquents, entament les tabous et conduisent à "l'écroulement des barrières culturelles qui séparaient les Bantou et les Aka", analyse l’anthropologue Pierre Kossi. Dans certaines localités, ces deux groupes fréquentent les mêmes églises, envoient leurs enfants dans les mêmes écoles, mangent ensemble…
Malgré ces avancées, on est encore loin du jour où une Bantoue épousera un Pygmée... "Les Bantous ont tellement de considération pour leurs filles qu’ils n’acceptent pas qu’elles épousent leurs anciens esclaves", explique Samadi Dillas, un fonctionnaire centrafricain de la Lobaye. Pascaline Poutou, élève dans un lycée de la région, avance d'autres arguments pour refuser de telles unions : "Impossible pour nous de les épouser, car ils sont pauvres et ne s'habillent pas avec élégance." Chez les Aka, le complexe d'infériorité persiste. Encore aujourd’hui, ils se sentent obligés d’utiliser obséquieusement le mot "mama" (mère) pour désigner une Bantoue. "Il est discourtois pour eux de faire la cour à une Bantoue", rappelle le chef aka, Paul Grebodé.
Avec l'intégration progressive des Pygmées, ces derniers clichés devraient finir par s'estomper.
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